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Channel: EQUIS – Le blog de Jean-François Fiorina
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Trop de reconnaissance tuerait-elle la reconnaissance ?

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Cette question, je me la pose depuis quelques temps au vu de l’inflation du nombre d’instances et d’organisations de certification, labellisation, accréditation. Une question à laquelle je n’ai pas de réponse définitive. Il faut être honnête, les accréditations, labels et autres types de reconnaissance sont des marqueurs importants de la qualité d’un établissement. GEM ne serait pas le GEM qu’il est devenu à sans ses accréditations, tout comme d’ailleurs nos collègues/concurrents français. J’ai souvent évoqué les avantages pour une institution de se lancer dans ces démarches et je reste persuadé de leur importance stratégique.

Par ailleurs, à titre personnel, je suis fortement investi dans ce domaine comme membre de la Commission d’accréditation des MS, Msc et Badge de la CGE, du Board d’EDAF et tout dernièrement de l’AccreSys committee de l’African Association of Business School, sans compter les différents audits que j’ai pu mener dans le cadre de la CGE, d’EPAS (EFMD) ou EDAF. J’ajouterais pour être tout à fait complet que je suis mentor pour AACSB de B-schools internationales. Fort de cette — longue et enrichissante expérience — je tire la sonnette d’alarme au moment où s’ouvre à Lisbonne, la conférence annuelle de l’EFMD. Pourquoi ?

  • Une profusion d’instances et de sigles aux objectifs, périmètres et standards différents

Très rapide tour d’horizon de ces différentes instances et agences :

  • Tout d’abord les internationales avec EQUIS (ou EPAS) / AACSB qui accréditent des institutions et AMBA des programmes (au départ des MBA puis progressivement d’autres types de Master et DBA),
  • Viennent ensuite les nationales avec là aussi différents objectifs. Pour nous écoles de management la CEFDG – Commission d’Evaluation des Formations de Gestion qui accorde le visa (c’est-à-dire la reconnaissance de l’État français) et le grade de master, avec qui sait, bientôt le grade de licence ?

Certains d’entre nous passent également, en fonction de leur politique de site et différents partenariats académiques devant l’HCERES – Haut Conseil de l’Evaluation de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur. Nous avons aussi France Compétences qui a intégré depuis début 2019 la CNCP et certifie des titres professionnels

Poursuivons l’inventaire avec la CGE – Commission des Grandes Ecoles qui délivre des labels pour des MS (Mastères Spécialisés), MSc (Master Of Science) ou encore des BADGE (Bilan d’Aptitude Délivré par les Grandes écoles).

Pas de stratégie ambitieuse en matière de formation continue sans passer par la norme NF214 ou Datadock dont on annonce qu’elle va encore évoluer. L’obtention de l’une permet d’aller plus vite pour l’autre et vice-versa !

Le numérique a engendré également ses propres certifications : 4DIGITAL – Digital Grande Ecole pour la CGE (niveau institutionnel) et EOCCS – Online Course Certification System.

Bien évidemment, ils ne sont pas exclusifs !

Je rajouterai dans une dernière catégorie tous les autres labels du type CFA ou autres certifications de langue.

Pour être tout à fait complet, je peux rajouter le BSIS pour la mesure d’impact d’une institution au sein de son territoire

À prévoir également rapidement l’obtention du label « Bienvenue en France » pour l’accueil des étudiants étrangers.

J’avais oublié le petit dernier à savoir  le « DD&RS » alias le label développement durable des établissements d’enseignement supérieur, fruit du travail collectif d’une dizaine d’universités et de grandes écoles, de la Conférence des Grandes Ecoles, de la Conférence des Présidents d’Université, du Ministère en charge du développement durable, du Ministère en charge de l’enseignement supérieur et du REseau Français des Etudiants pour le développement Durable.

Pour la forme, mentionnons également ISO pour quelques établissements

De toute façon, j’en oublie certainement !

  • Une gestion de plus en plus lourde et consommatrice de ressources

Pour nous écoles de management qui offrons une large gamme de programmes couvrant tous les segments du marché, du bachelor au DBA et pour des publics de formation initiale et continue, nous devons candidater pour chacune de ces accréditations, chacune couvrant un domaine de notre activité et pas la totalité.

Il faut aussi être réaliste, la concurrence entre nous est telle que chaque école souhaite se démarquer ou ne pas se faire dépasser. Donc chaque fois, qu’une école obtient une nouvelle accréditation, chacune se « précipite » vers cette reconnaissance.

Cette course aux armements est un peu dangereuse. Personne ne prendra le risque de ne pas solliciter une accréditation car l’impact peut-être important dans les classements. De ce fait, cela engendre des coûts considérables, à la fois en termes de RH car les profils sont de plus en spécialisés et de SI (pour la gestion des données). Pour nous à GEM, c’est une équipe de 3 personnes à plein temps.

  • Des process de plus en plus lourds

Chaque système devient plus exigeant — ce qui parait normal — mais la conséquence est un alourdissement des procédures. Chaque système souhaite désormais faire ses propres visites sur site, avec à chaque fois, selon des organisations différentes.

Pour GEM, cette année, nous avons eu la visite d’Amba fin janvier, suivie une semaine plus tard par l’équipe d’AACSB. À peine le temps de souffler, début mars, audit In situ par la CGE de notre MSc Humanitarian management (en partenariat avec Bioforce) avant d’enchainer 3 semaines plus tard par Datadock puis le renouvellement EOCCS pour notre formation en géopolitique.

En parallèle, ce sont les enquêtes d’insertion de nos titres professionnels et la préparation des dossiers pour la CEFDG pour envoi à l’automne 2019. Au final, des équipes sur le qui vive en permanence car notre cellule accréditation ne travaille pas toute seule mais en relations avec les différents services de l’école.

  • Des exigences de plus en plus conséquentes

La plupart des agences exigent désormais la présence de leurs logos sur nos différents supports de communication, voire sur le diplôme, ce qui peut engendrer une certaine confusion de notre image en externe.

Pour les profanes, cela fait un peu bataille de labels et engendre plus de questionnements et d’inquiétudes alors que l’inverse est recherché !

Les écoles qui profitent de ce que j’appelle la « misère éducative » sont également très fortes pour créer des labels avec des sigles à rallonge qui perturbent encore plus le marché.

Il faut également prendre en compte le reporting de suivi. Si l’on ajoute à celui-ci, les classements et les reportings demandés par nos gouvernances (et l’Etat), nous nous retrouvons dans un flux permanent, dans une logique très court-termiste alors que nos évolutions et nos projets sont de plus en plus à moyen/long terme.

Et je passe sous le silence différentes définitions d’un même mot ou statut. La notion de « professeur permanent » pour chaque instance pourrait faire l’objet d’un colloque !

  • Des injonctions contradictoires

Nous nous retrouvons finalement dans une situation un peu paradoxale, entre une exigence d’assurance qualité — tout à fait légitime — et des agences d’assurance qualité « contraintes » d’être de plus sourcilleuses pour être visibles et crédibles.

Une demande croissante de nos étudiants ou d’autres clients pour des reconnaissances de nos activités.

Et un spectre de plus en plus large de nos activités nécessitant une reconnaissance pour montrer la qualité et l’expertise de ce que nous faisons.

La solution ne peut-être que globale et doit d’abord passer par des échanges et des discussions avec ces différents acteurs, à l’instar de ce que fait la CEFDG depuis 2 ans avec une rencontre/bilan annuelle.

De toute façon, cela ne peut se faire que si l’ensemble de notre communauté se mobilise. Je sais que le Chapitre des écoles de management est prêt à s’engager dans cette voie.

Une des solutions sera également peut-être de travailler sur une classification en distinguant les accréditations d’institutions, de programmes et ensuite de spécialisations.

Il ne nous restera plus alors qu’à faire preuve de pédagogie pour l’expliquer à nos différentes parties prenantes !

Finalement, à  quand une Agence qualité des agences qualité pour certifier ces différentes reconnaissances ?


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